La rencontre des représentants religieux européens
avec le président de la Commission Européenne


Le 12 juillet à Bruxelles a eu lieu la rencontre de 15 représentants du christianisme, du judaïsme et de l’islam avec le président de la Commission Européenne José Manuel Barroso. Les Églises orthodoxes y ont été représentées par le métropolite Emmanuel de France (Patriarcat de Constantinople), l’évêque Hilarion de Vienne et d’Autriche (Patriarcat de Moscou) et l’évêque Athanase d’Achaïe (Église de Grèce). Au nombre des participants il y avait l’évêque Josef Homeyer, le président de la Commission des Épiscopats de la Communauté européenne, l’évêque de Londres Richard Chartres, le pasteur Thomas Wipf, vice-président de la Conférence des Églises européennes, ainsi que des délégués du judaïsme et de l’islam.

En ouvrant la rencontre J. M. Barroso a exprimé ses condoléances aux chefs religieux d’Angleterre à l’occasion des récents attentats à Londres. « Il est inadmissible et criminel, a-t-il affirmé, d’invoquer la religion comme justification des actes de violence». Le président de la Commission a fait ensuite part de ses réflexions sur l’avenir de l’intégration européenne et du dialogue entre les religions et les institutions de l’Union.

Chaque représentant religieux a été invité ensuite à exprimer son opinion au sujet du dialogue entre l’Union Européenne et les organisations religieuses.

Dans son intervention l’évêque Hilarion de Vienne et d’Autriche, représentant de l’Église orthodoxe russe auprès des Institutions européennes, a affirmé : « Le traité constitutionnel européen invite l’Union à un dialogue régulier, transparent et ouvert avec les Églises et les organisation religieuses, philosophiques et non-confessionnelles. Il est important que malgré le résultat négatif des référendums sur le traité constitutionnel en France et aux Pays-Bas cette exhortation soit préservée et incluse dans le document législatif qui succédera au traité».

En poursuivant l’évêque Hilarion a remarqué : « Le discours intellectuel européen est caractérisé actuellement par l’opposition entre deux systèmes de valeurs : l’une d’elles est héritée des théories anthropologiques de l’époque de la Renaissance, l’autre est fondée sur la vision religieuse du monde. Cette opposition est souvent considérée comme une collision entre l’humanisme libéral, fondé sur la science, et les «spéculations» théologiques et métaphysiques du passé. En réalité, il s’agit plutôt de deux versions complètement différentes de l’humanisme dont l’une est issu des convictions athées, tandis que l’autre s’inspire des valeurs religieuses et spirituelles. D’autre part, la religion n’est pas un phénomène du passé : elle représente une force spirituelle qui anime des millions de nos contemporains. Les dernières décennies du XXe siècle ont été le temps d’une importante renaissance religieuse dans différentes parties de la planète, notamment dans les pays de l’Europe orientale avec la population orthodoxe et catholique, comme la Russie et la Pologne».

L’évêque Hilarion a souligné également qu’il est « inexact de croire que le système religieux de valeurs est tombé en désuétude, qu’il n’est plus à la mode et qu’il doit être remplacé par les normes séculières. <...> Les humanistes libéraux contemporains critiquent les religions pour leur présumé potentiel d’aggression et l’incapacité de coexistence pacifique les unes avec les autres. Cependant, toutes les religions mondiales ont un caractère pacifique et sont disposées à une coexistence harmonieuse. Ce avec quoi les religions ont pourtant du mal à se concilier, c’est avec l’athéisme et le sécularisme militants qui leur lancent un défi. Pour la plupart des religions est absolument inadmissible la tendance actuelle de les bannir de la sphère sociale – des écoles, des universités, des médias, de la vie publique et politique – et de les réduire à la pratique privée de quelques individus. Cela est contraire à l’impératif missionnaire du plus grand nombre de religions, en particulier du christianisme, qui doit avoir un espace dans le domaine social pour la prédication de ses valeurs, de son enseignement spirituel et éthique».

En conclusion, le représentant de l’Église orthodoxe russe a affirmé : « Les chefs religieux de l’Europe sont déjà actuvement impliqués dans le dialogue avec les structures politiques du continent, mais il me semble que ce dialogue doit être élargi et mieux structuré. Nous devrions passer des rencontres privées dont les participants n’ont aucune responsabilité les uns à l’égard des autres, à un dialogue tout à fait officiel dans lequel les hommes politiques européens et les représentants des organisation religieuses soient des partenaires égaux. Ce n’est qu’ainsi que ce dialogue deviendra véritablement régulier, transparent et ouvert».

A l’issue de la rencontre les participants ont adopté une déclaration commune qui stipule : « A l’occasion de la rencontre du président Barroso avec les chefs religieux chrétiens, juifs et musulmans, qui a eu lieu le 12 juillet 2005 à Bruxelles, le président Barroso et les chefs religieux ont souligné qu’ils sont décidés à l’édification de l’Europe solidaire, pacifique, florissante, unie et libre dans laquelle tous les hommes et toutes les nations, indépendamment de leur appartenance religieuse, de leur langue, de leur identité culturelle, de leur tradition et de leur origine ethnique, peuvent vivre ensemble et se sentir chez soi. La Commission Européenne et les chefs religieux sont décidés à mettre en pratique cette vision commune de l’Europe ».

http://orthodoxeurope.org/#19-2-188