Qu’allons-nous T’offrir, Ô Christ, pour être apparu sur terre comme un homme ? 

MESSAGE DE NOEL DU PATRIARCHE ALEXIS II DE MOSCOU ET DE TOUTES LES RUSSIES aux hiérarques, pasteurs, moines et à tous les enfants fidèles de l’Eglise orthodoxe russe 2007/2008

Qu’allons-nous T’offrir, Ô Christ, pour être apparu sur terre comme un homme ? 
Chacune de Tes créatures T’apporte en effet son témoignage de gratitude :
les anges, leur chant ; les cieux, l’étoile ; les mages, leurs dons ;
les pasteurs, leur émerveillement ; la terre, la grotte ; le désert, la crèche :
mais nous, une Mère vierge. Ô Dieu d’avant les siècles, aie pitié de nous 
!

Stichère du Lucernaire des vêpres de Noël

Chers et bien-aimés dans le Seigneur, éminents hiérarques, vous tous, membres de l’ordre des prêtres, des diacres et des moines, pieux laïcs, enfants fidèles de notre sainte Eglise orthodoxe !

PATRIARCHE ALEXIS II DE MOSCOU ET DE TOUTES LES RUSSIESMaintenant, à la suite des sages d’antan, nous venons, guidés par l’étoile de Bethléem, vers la crèche de l’Enfant divin, notre Seigneur Jésus-Christ. Nous nous souvenons comment les mages « furent saisis d'une très grande joie et, étant entrés dans la maison, virent le petit Enfant avec Marie, sa mère, et se prosternèrent devant Lui ; ils ouvrirent ensuite leurs trésors et lui offrirent en présent de l'or, de l'encens et de la myrrhe » (Mt. 2, 10-11). Entrant dans la fête de la Nativité du Christ, nous devons également nous interroger : qu’offrirons-nous en présent à la crèche, qui reçoit maintenant le Dieu que rien ne peut contenir ?

Il n’a besoin ni de notre orgueil, ni de notre gloire, ni de nos réalisations matérielles. Seront poussière à Ses yeux nos vaines pensées, nos inquiétudes de vie, les tentatives des hommes de s’élever les uns au-dessus des autres. Que notre présent principal au Sauveur du monde né de la Vierge soit une foi ferme et sincère, à l’exemple de la très pure Vierge Marie qui a dit à l’Archange lui annonçant la bonne nouvelle : « Je suis la servante du Seigneur ; qu’il me soit fait selon ta parole » (Lc. 1, 38). Beaucoup de personnes sont aujourd’hui habituées à estimer que seule leur raison libre et indépendante peut leur apporter le bonheur et construire correctement la vie personnelle et sociale. Mais l’Eglise a, durant les siècles de son existence, vu à de nombreuses reprises comment les hommes qui s’étaient enorgueillis et éloignés de Dieu se sont finalement retrouvés malheureux et pitoyables. Au contraire, l’exemple de la très sainte Mère de Dieu nous montre quelle hauteur peut atteindre l’homme qui se remet avec foi à la volonté de Dieu. « La Vierge Marie – écrit saint Ephrem le Syrien – est fille de la Lumière, car à travers elle furent illuminés le monde et ses habitants. » Avec foi, portons aussi au monde la Lumière, laquelle est le Christ Seigneur !  

Qu’un autre de nos présents, offert à la crèche de Bethléem, soit l’amour – un amour chaleureux et actif les uns envers les autres et envers tous les hommes qui nous entourent. Prenons comme directive pour chaque jour de notre vie la parole du Christ : « A ceci tous connaîtront que vous êtes mes disciples, si vous avez de l'amour les uns pour les autres. » (Jn. 13, 35). Posons des actes d’amour et de miséricorde envers ceux qui sont aujourd’hui dans la peine et la solitude, qui souffrent, se découragent et désespèrent, comme il y en a certainement autour de nous.

L’amour mutuel des époux, des enfants et des parents, cimenté par l’amour de Dieu et des hommes qui nous entourent, a toujours été à la base d’une famille chrétienne solide. L’année nouvelle a été déclarée, dans notre patrie, année de la Famille, et dans nombre d’autres pays, où notre Eglise sert Dieu, le souci de la famille devient également essentiel. Nous, enfants fidèles de l’Eglise du Christ, devons manifester ce souci avec zèle. L’ensemble de la société, surtout la jeunesse, doit redécouvrir une vérité simple et éternelle : là où il n’y a pas d’amour, de responsabilité mutuelle, de volonté d’apporter sa vie en présent à ceux qu’on aime, il n’y a ni bonheur, ni plénitude de l’être. Les divorces, les avortements, la course au lucre et aux divertissements sans fin, l’oubli de ses propres enfants, qui se retrouvent si souvent privés de l’amour et de la douceur de leurs parents, tout cela transforme la vie de chaque homme et de l’ensemble de la société en une existence sans joie, remplie de remords. Si, par contre, dans les familles règne l’amour, la foi, la joie du don mutuel et du soutien l’un de l’autre, nous serons entourés de bien plus de visages heureux. Et le destin de nos peuples ne pourra qu’en être amélioré.

Bien-aimés ! Durant l’année écoulée, le Seigneur a béni Son Eglise par la paix, la joie et le succès dans de nombreuses actions, entreprises pour le salut du peuple de Dieu. Lors de la fête de l’Ascension du Seigneur, fut rétablie la plénitude de l’unité entre le Patriarcat de Moscou et l’Eglise russe hors-frontières, dont relève une grande partie de notre peuple ecclésial disséminé dans différents pays du monde. Désormais, nous sommes à nouveau une seule Eglise, cimentée par la communion sacramentelle et de prière, et portant témoignage de la vérité de la Sainte Orthodoxie non seulement dans notre patrie, mais « jusqu’aux confins du monde » (Ac. 1, 8).

Sur le territoire de notre Eglise furent apportées les saintes reliques du saint apôtre et évangéliste Luc, de saint Spyridon de Trimythonte, de saint Jean Chrysostome. De Saint-Pétersbourg à Moscou, ont été amenées les reliques du saint grand-prince Alexandre Nevski, qui furent ensuite transportées à travers les villes historiquement liées aux exploits terrestres de ce défenseur céleste de notre patrie. De très nombreux enfants de l’Eglise sont venus dans les églises orthodoxes pour vénérer ces saints agréables à Dieu, recevoir d’eux la consolation spirituelle et la bénédiction et pour guérir de leurs maladies spirituelles et physiques.

Avec la participation active du peuple orthodoxe, se sont déroulées les célébrations à l’occasion du 600e anniversaire du décès de saint Sabbas de Storojevsk, disciple de saint Serge, intercesseur pour les pieux dirigeants russes et modèle des moines. Pour un meilleur avenir pour la Russie, pour la rectification de ses chemins historiques, nous avons prié devant l’icône de la Mère de Dieu « Souveraine » le jour du 90e anniversaire de son apparition. En prières et solennellement, nous avons commémoré le 90e anniversaire du rétablissement du patriarcat dans notre sainte Eglise. En mémoire des centaines de néo-martyrs et confesseurs russes, des milliers de victimes innocentes tuées à l’époque du pouvoir déicide, une croix-mémorial fut amenée depuis le monastère de Solovki à Moscou, au polygone de Boutovo, là où des milliers de martyrs sacrifièrent leur vie pour la foi et la vérité. Dieu fasse que le souvenir de leur exploit affermisse notre peuple sur les chemins de la renaissance spirituelle !

Durant l’année écoulée, par la grâce de Dieu, j’ai pu à de nombreuses reprises célébrer en la ville-mère de Moscou, j’ai visité les paroisses et monastères de la région moscovite et j’ai séjourné à Valaam où j’ai consacré un skite en l’honneur de l’icône de la Mère de Dieu de Smolensk. Le Seigneur m’a permis de visiter les diocèses de notre Eglise de Vologda, Ijevsk et Chersonèse, de témoigner des valeurs spirituelles et de la mission sociale de l’Orthodoxie devant les membres de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe à Strasbourg. J’ai également parlé de cela – de notre foi, qui éclaire et transfigure le monde – avec des dirigeants politiques et des hommes de différentes croyances et convictions.

Les peuples spirituellement desservis par l’Eglise orthodoxe russe avancent fermement sur la voie de la renaissance. Sur ce chemin, de nombreux succès ont déjà été engrangés. Mais la vie nous amène également des difficultés, des épreuves et des tentations. L’année écoulée, l’on a tenté plus d’une fois de nous diviser pour des raisons nationales, politiques ou sociales. L’Eglise, accompagnant son peuple dans les joies et les peines, le rappelle inlassablement aux hommes : seule l’unité nous rendra forts, libres, capables de transfigurer le monde. L’unité conciliaire du peuple, dont ne peuvent se séparer ni l’Eglise ni le pouvoir civil, devient pour notre société la base des bonnes actions. Et nous prions pour cette unité, nous efforçant de la consolider.

Préservons précieusement, dans notre Eglise également, « l’unité de l’esprit par le lien de la paix » (Eph. 4, 3). Et en cette fête lumineuse, reconnaissons au plus profond de notre cœur et de notre esprit que c’est justement à l’unité que nous a appelé le Seigneur né à Bethléem. « Que de bien – écrit saint Basile le grand – nous a fait l’Incarnation du Sauveur, car la nature humaine, dissoute et dispersée en des milliers de morceaux, dans la mesure de ses forces, se rassemble et s’unit à Dieu ! »

Eminents hiérarques, chers pères, frères et sœurs, je vous félicite tous à l’occasion de la fête de Noël et de la nouvelle année qui vient ! Que la lumière de l’étoile de Bethléem éclaire toujours nos âmes, nous donnant la force de marcher sur la voie du Christ Lui-même ; qu’Il nous donne la santé, la paix, la force spirituelle et qui nous mène à travers les chemins difficiles de la vie. Que l’an de grâce du Seigneur qui vient soit pour la sainte Eglise et le peuple de notre terre, paisible, constructif et fructueux !
Que la grâce de notre Seigneur Jésus-Christ soit avec vous ! Amen (1 Thess. 5, 28).

+ АLEXIS,
PATRIARCHE DE MOSCOU ET DE TOUTES LES RUSSIES

Моscou, Noël 2007/2008

 

(traduit du russe par le P. Serge Model, Bruxelles)